cadeau argentLe 05/12/2016. A l’approche de Noël, l’IEB revient sur les bénéfices en termes de bien-être des actions généreuses : faire et recevoir des cadeaux rend-il heureux ? Décryptage et conseils pour faire le cadeau idéal.

Pour un économiste classique, offrir des cadeaux est tout sauf rationnel. Très fréquemment, les cadeaux reçus ne plaisent pas. Dans les enquêtes, les receveurs disent souvent qu’ils auraient préféré avoir de l’argent à la place des cadeaux reçus. Et quand on leur demande de donner un équivalent monétaire aux cadeaux reçus, leur évaluation est en moyenne très inférieure (un tiers environ) au coût réel de ces cadeaux. Pour certains économistes, Noël est donc un grand gaspillage d’argent. Si nous faisons des cadeaux néanmoins, c’est parce que les cadeaux n’ont pas qu’une valeur économique. En faisant un cadeau personnalisé, on exprime à la fois qui on est, comment on perçoit le receveur et comment on perçoit ou envisage sa relation avec lui. Le cadeau est une déclaration symbolique de tout cela. L’argent ne conviendrait pas à tous ces messages, tout en posant d’autres problèmes (de comparaison sociale par exemple).

Faire et recevoir des cadeaux rend heureux

Il a clairement été montré par les chercheurs en économie du bonheur qu’offrir des cadeaux rendait heureux. Des recherches ont obtenu que les dépenses pour les autres étaient les seules dépenses qui augmentent durablement le bonheur des individus (1). A l’inverse, dépenser pour soi n’influence le bonheur que de manière très éphémère. Pourtant, par défaut, la plus grande partie de nos dépenses est dirigée vers… nous-mêmes. Chez les célibataires, le ratio entre dépenses pour soi (dépenses forcées incluses) et dépenses pour les autres est de 10 pour 1. Noël a donc le mérite de nous faire penser à faire des cadeaux. Quant à recevoir des cadeaux d’autrui, cela augmente aussi le bonheur. Et la sensation est sans doute assez proche dans les deux cas, avec la même expérience agréable d’une connexion sociale avec quelqu’un.

Faire un cadeau à quelqu’un, c’est entretenir voire renforcer le lien social qui vous unit à cette personne. Le cadeau fonctionne comme un marqueur du lien social. Or une des composantes du bien-être psychologique est le sentiment de connexion aux autres. Quand on fait des cadeaux, comme lorsque l’on en reçoit, ce sentiment de connexion augmente. L’effet est encore plus prononcé quand on offre un cadeau en mains propres et que l’on constate la joie et la reconnaissance sur le visage du receveur (2)

Trouver le cadeau adapté

Malheureusement, un certain nombre de biais psychologiques viennent nous empêcher de faire le bon cadeau. On tend à souffrir d’un biais de projection qui nous empêche de prendre la bonne perspective et d’avoir l’empathie nécessaire pour trouver le cadeau qui plaira à la personne visée. En plus, on surestime l’importance de la valeur du cadeau sur l’appréciation du receveur. L’argent dépensé n’est pourtant pas le premier critère qu’utilise le receveur pour évaluer l’implication du donneur dans son cadeau. On pourrait ainsi dépenser beaucoup moins sans diminuer le bonheur tiré de cette période de l’année. En cela, Noël est bien une grande gabegie, mais pas comme le pensent les économistes classiques.

Au fil des recherches des psychologues, les caractéristiques du « cadeau idéal » sont apparues de plus en plus nettement. Il en ressort que le cadeau qui serait idéal pour le receveur :

  • Indique les sacrifices faits par le donneur (temps, effort, argent dépensé…) ;
  • Vise uniquement le plaisir du receveur (et pas celui du donneur !) ;
  • Est un bien non utilitaire ;
  • Est approprié spécifiquement au receveur ;
  • N’était pas attendu par le receveur ;
  • Et, finalement, réussit à lui faire plaisir.

Ce sont les critères qui provoquent la satisfaction le jour J. Après, si l’on veut que l’impact sur le bonheur du receveur dépasse la seule période des fêtes, il faut viser des cadeaux qui génèrent du plaisir par anticipation (par exemple un billet pour un spectacle prévu plusieurs mois après), qui créent des souvenirs durables (les expériences plutôt que les biens matériels) ou qui rappellent de temps en temps la gentille attention qui a été faite. Quand un cadeau est réussi, sa portée dépasse largement le seul plaisir à le consommer.

Faire des cadeaux toute l’année

Enfin, il convient de garder à l’esprit que le bien-être que l’on tire des cadeaux comme de toute récompense est marginalement décroissant. On ne tire pas deux fois plus de plaisir à avoir eu huit cadeaux sous le sapin plutôt que quatre. Une meilleure stratégie serait de les répartir dans le temps, en en offrant un peu tous les mois. Continuons de faire la fête ensemble à Noël mais faisons en sorte d’offrir des cadeaux toute l’année !
(1) Dunn E. , Aknin L. et Norton M., « Spending money on others promotes happiness », Science, n°319, 2008
(2) Dunn E., Ashton-James C., Hanson M. et Aknin L. (2010), “On the costs of self-interested economic behavior: How does stinginess get under the skin?”, Journal of Health Psychology, 15, 627-633