choisir-son-travail-selon-les-bons-criteresLe 07/10/2016. Les décisions en matière d’emploi sont loin d’être efficaces. Trop souvent on choisit un emploi selon des critères qui ne sont pas ceux qui généreront, une fois en poste, de la satisfaction.

Les décisions des chercheurs d’emploi paraissent se fonder essentiellement sur des critères externes* (prestige social, revenus, perspectives de carrière, sécurité de l’emploi) qui ne coïncident ni avec les résultats des études sur la satisfaction au travail ni avec les préférences exprimées par les travailleurs eux-mêmes. La satisfaction au travail est en réalité bien davantage influencée par les facteurs intrinsèques et sociaux que par ces facteurs externes.

Les études qui quantifient l’impact des différentes caractéristiques des emplois sur la satisfaction au travail** obtiennent que le facteur le plus important est la qualité des relations sociales, suivi par le contenu du travail. Les relations sociales sur le lieu de travail ne sont en général pas très satisfaisantes, en tout cas beaucoup moins qu’à l’extérieur du bureau***. On choisit ses amis ; on choisit rarement ses collègues. Mais, lorsqu’il arrive que l’on apprécie ses collègues ou son chef, alors la satisfaction au travail et la satisfaction de la vie sont largement rehaussées****. Pour la satisfaction au travail, les caractéristiques externes des emplois, c’est-à-dire les perspectives de promotion, les revenus, la sécurité de l’emploi et le temps de travail, viennent clairement après.

Dans les enquêtes sur les préférences déclarées par les travailleurs eux-mêmes, les caractéristiques externes arrivent également derrière les caractéristiques intrinsèques. Par exemple, dans les pays de l’OCDE, seulement 20 % des travailleurs disent qu’avoir un salaire élevé est très important pour eux (un chiffre qui vaut également pour les perspectives de promotion), alors qu’ils sont 30 % à considérer l’autonomie dans le travail comme très importante et 50 % le fait d’avoir un travail intéressant.

Si les préférences déclarées ne sont pas exactement alignées sur la satisfaction au travail ressentie (laissant entrevoir quelques erreurs d’anticipation affective, notamment la sous-estimation de l’importance des relations sociales), elles s’en approchent néanmoins beaucoup plus que les préférences révélées par les décisions. Lorsqu’on prend une décision aussi importante que de choisir un emploi, on le fait en s’appuyant sur des critères qui paraissent rationnels mais qui ne seront pas les vrais leviers de notre satisfaction.

D’où un conseil à celui qui cherche un emploi : n’adoptez pas un point de vue extérieur, froid et rationnel pour juger des emplois qui vous sont proposés. Essayez plutôt de vous mettre en situation, de vous imaginer en train d’exercer ce travail, et analysez comment serait alors votre vie au travail (et à l’extérieur) dans ses différentes dimensions. N’omettez surtout pas la dimension sociale. Pour augmenter vos chances d’être satisfait de votre futur emploi, plutôt que de passer le dernier quart d’heure d’un entretien d’embauche à discuter des perspectives de promotion, demandez à rencontrer vos futurs collègues…

Références:

*Clark A. (2001), « What really matters in a job? Hedonic measurement using quit data », Labour Economics, 8 (2), 223-242.

**Clark A. (2005), « What makes a good job? Evidence from OECD countries », in Bazen S., Lucifora C. et Salverda W., Job Quality and Employer Behaviour, Palgrave ; Huang X. et Van de Vliert E. (2004), « Job level and national culture as joint roots of job satisfaction », Applied Psychology: An International Review, 53, 329-348 ; Handel M. (2005), « Trends in perceived job quality, 1989 to 1998 », Work and Occupations, 32 (1), 66-94.

***Kahneman D., Krueger A., Schkade D., Schwarz N. et Stone A. (2004), « A survey method for characterizing daily life experience: The Day Reconstruction Method », Science, 306 (5702), 1776-1780.

****Rath T. et Harter J. (2010), Wellbeing: The Five Essential Elements, New York, Gallup Press.

(le contenu de cet article est tiré du livre Heureux comme Crésus ? Leçons inattendues d’économie du bonheur, éditions Eyrolles)